9 feuilles
d'un cahier des charges

L'exil est une mort qui impose une nouvelle naissance. Pour Abel Robino : une possibilité de n'être (naître?) personne.

Abel Robino présente ici neuf feuilles recouvertes chacune d'un morceau de lettre reçue, de dessins volés, de traces de couleurs, de morceaux de calligraphie, de papiers collés.

Neuf feuilles, neuf lettres adressées à Abel Robino, poètes, amis, famille, inconnus qui lui disent qu'il est. Chacune écrite de la terre natale, territoire du passé, chacune lue en exil, territoire sans attache. Neuf lettres, pour combler le trou béant de la rupture. Neuf lettres, autant de miroirs du recevant. Je est un autre avait déjà écrit Rimbaud.

À partir de ces neuf lettres, Abel Robino en a composé autant de versions pour une tentative d'autoportrait à partir des miroirs tendus.

Chaque portrait n'est pas cadré mais, ainsi qu'une pierre tombale, semble émerger d'une surface stérile, desséchée, aride. Sous la tombe comme sous la peinture, ça nous parle de nous.

Neuf portraits reconstitués pour recouvrir le même blanc aveuglant du vide de l'oubli.

Flottant entre ciel et terre, déjà inaccessible, un corps vide, tressé de bandelettes blanches, en forme de bouche ou de sexe, dit la perte toujours présente, la déchirure originelle de l'homme et sa nostalgie.

De ce chemin évanescent à la matrice à jamais perdue, il n'en restera que le reflet obsédant dans le puits sans fond de la mémoire.

Michel Berlemont


40 X 50